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Culture

Le zébu : Le moyen de consolider le pouvoir

02/01/2023 13:31 © Midi Madagasikara

Tant de sang de bovin à bosse versé autant que l’encre des érudits définissant l’animal emblématique de la Grande-Ile. Les Malgaches les appellent Aomby, Jamoka, barea. Durant des siècles, les occasions de les abattre se sont multipliées. C’est la tradition !

D’Antsiranana à Taolagnaro en passant par Boeny et Toamasina, avoir des centaines de têtes de zébu est un signe de richesse. C’est ce qu’on a appris en primaire. Selon la légende, ils étaient en nombre considérable du temps des ancêtres. Un bœuf malgache pesait plus de 500 kg. Néanmoins, à cause des conditions climatiques et l’exploitation abusive, le “barea” est victime d’une insuffisance pondérale. Dès lors, les pasteurs voient leur troupeau s´amoindrir. Malgré cette situation accablante, les sacrifices continuent d’une façon exponentielle. Bain royal ou intronisation des rois, circoncision, mariage, inauguration des habitats, veillée mortuaire, le zébu est l’un des éléments indispensables lors des cérémonies. L’animal incarne le sacré. Autrement dit, c’est un moyen de réconcilier les personnes ayant des différends. Cette coutume perdure jusqu’à présent. Elle n’est pas dénaturée et convainc la descendance. L’intention est bonne, mais l’arrière-pensée se manifeste lorsqu’un souverain ou un leader offre un sacrifice. Inviter les habitants du village nécessite des ressources. Décapiter des dizaines de bœufs est un signe de puissance. Par conséquent, la cérémonie a un maître, c’est celui qui nourrit gratuitement la population. Celle-ci ayant mangé le repas servi, elle n’ose pas contester le discours du nourricier. Détenteur de pouvoirs, grâce à la cérémonie, l’organisateur s’installe au sommet de la pyramide de la société.

Les dirigeants et les détenteurs économiques suivent à la lettre l’exemple des ancêtres, quoique le style se modernise. Vêtus élégamment, pour attirer l’attention, ces grands hommes manipulent la masse avec leurs zébus. « Avant tout, nous allons remercier le seigneur, et les ancêtres, qui nous a permis d’organiser cette festivité… Comme prévu, nous avons emmené avec nous, 10 bœufs. Nos ancêtres nous ont enseigné que dix, c’est la plénitude, le bonheur. Alors, chers compatriotes, que la malédiction soit hors de cet endroit… Ces “omby” sont à vous. Leurs chairs nous unissent, leur sang nous purifie. Cette cérémonie tissera notre lien d’amitié », un beau discours que les Malgaches entendent souvent. Des propos qui réchauffent le cœur. D’après Njato Rasolondrainibe, doctorant en sociologie de l’Université d’Ambohitsaina, ce genre de discours met tout le monde d’accord, « bien que les deux religions monothéistes, notamment le christianisme et l’islam, soient pratiqués dans la Grande-Ile, les Malgaches, en l’occurence les ruraux, sont toujours attentifs quand ils entendent le mot “razana” dans le discours. Évoquer dans un “kabary”, les ancêtres rend crédible l’orateur. L’art oratoire de nos jours exige de prononcer ce mot ! ».

Pour sa part, l’économiste Jonas Fidera avance son avis sur le sacrifice de zébu. « Hormis la partie Sud de Madagascar où les prix des bœufs sont abordables, les Malgaches n’arrivent plus à acheter la viande rouge. Le kilo coûte environ 20 000 ariary dans certaines régions, surtout en ville. Donc, ce genre de cérémonie sera une occasion en or. Des sacs en plastique garnis feront l’affaire! ». En ville, l’organisateur gagne le respect des invités. C’est là que le maître de cérémonie impose ses idées. Mais cette astuce ne fonctionne guère de nos jours alors qu’elle était efficace entre les années 1960 et 2000.

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