Innovation climatique : Madagascar expérimente un système d’alerte sécheresse
A Madagascar, le projet « Opérationnalisation du Système d’Alerte Précoce (SAP) et des Actions Anticipatoires (AA) dans le Grand Sud) » a permis la création d’un tableau de bord inédit pour suivre et anticiper les épisodes de sécheresse. Un outil stratégique qui marque une étape décisive dans la lutte contre l’insécurité alimentaire et la malnutrition.
Anticiper la sécheresse
Depuis plusieurs années, le sud de Madagascar est frappé par des sécheresses de plus en plus fréquentes et intenses. Les précipitations saisonnières y ont fortement baissé depuis 2015, à l’exception d’une seule saison agricole, en 2018-2019. La diminution des pluies, combinée à une hausse des températures, a perturbé les cycles hydrologiques et accentué la vulnérabilité des populations. Entre 2018 et 2022, 1,14 million de personnes ont souffert d’insécurité alimentaire aiguë dans la région, dont 14 000 en situation de catastrophe, selon le Cadre intégré de classification de la sécurité alimentaire (IPC). L’ONU a qualifié cette crise de première famine climatique au monde. En début d’année 2025, deux cyclones successifs ont encore aggravé la situation, détruisant des habitations, des cultures et des infrastructures essentielles, tout en accentuant la malnutrition aiguë qui touche 358 000 enfants de moins de cinq ans.
Face à ce constat, le projet « Opérationnalisation du Système d’Alerte Précoce et des Actions Anticipatoires » a été lancé pour doter la Grande Île d’un mécanisme capable d’anticiper les crises climatiques. L’initiative vise à renforcer la préparation et la capacité de réponse des institutions et des communautés, en passant d’une logique réactive à une logique d’anticipation. Le projet a été mis en œuvre par le PNUD, la FAO, le PAM et l’UNICEF, avec un financement de la Protection civile et aide humanitaire de l’Union européenne (ECHO). Il a permis de renforcer les capacités de la Direction Générale de la Météorologie, du Bureau National de Gestion des Risques et Catastrophes (BNGRC) et de la Cellule de Prévention et d’Appui à la Gestion des Urgences, afin d’assurer une collecte et une centralisation plus efficace des données.
Renforcement de la résilience des communautés
Le principal acquis du projet est la création du premier tableau de bord national de suivi de la sécheresse. Cet outil numérique interactif permet de collecter, analyser et visualiser en temps réel des données climatiques, hydrologiques et sociales. Il intègre notamment les niveaux de précipitations, l’humidité des sols, ainsi que des indicateurs de vulnérabilité et de malnutrition. Conçu dans une approche participative, le tableau de bord a été testé par les techniciens, les décideurs et les communautés locales. Les participants à l’atelier de clôture du projet ont pu simuler des scénarios d’alerte et formuler des suggestions pour améliorer son efficacité et son accessibilité. L’outil constitue une avancée importante pour Madagascar, qui ne disposait jusqu’ici d’aucun système national de surveillance de la sécheresse.
L’atelier de clôture du projet, organisé dans la région Anôsy en présence des gouverneurs de l’Anôsy, de l’Androy et de l’Atsimo Andrefana, a permis de présenter les résultats et de formuler des recommandations pour la suite. Une phase d’expérimentation est prévue dès octobre 2025 afin d’affiner les paramètres du système et de consolider son fonctionnement. Les partenaires ont insisté sur la nécessité d’étendre l’utilisation du tableau de bord à d’autres régions du pays, particulièrement exposées aux effets du changement climatique. Si le projet touche à sa fin, il laisse un héritage durable : un outil technologique et institutionnel capable de déclencher des actions précoces et de renforcer la résilience des communautés.