Danse : Soa Ratsifandrihana explore la circulation du geste
Avec Groove, présenté au Théâtre Vidy à Lausanne les 16 et 17 décembre, la danseuse et chorégraphe Soa Ratsifandrihana interroge la manière dont les styles traversent les époques, les continents et les corps. Son solo n’est pas une archive, mais une manière de montrer comment les gestes migrent, mutent et créent de nouvelles histoires.
Des styles qui se transforment en chemin
On parle souvent de “danses traditionnelles”, comme si leurs formes étaient figées. Le solo Groove prend le contrepied de cette idée : il montre qu’un mouvement, au moment même où il est transmis, change déjà. Formée au Conservatoire national supérieur de musique et de danse de Paris, Soa Ratsifandrihana revendique cette fluidité. Elle ne cherche pas à reproduire des styles, mais à révéler ce qui les traverse. Loin de présenter l’Afindrafindrao comme une danse “patrimoniale” malgache, elle le traite comme un matériau vivant, susceptible d’être mélangé, déplacé, découpé. Le Madison, danse en ligne largement popularisée par les clubs et les fiestas, la rejoint comme un souvenir personnel, mais aussi comme un phénomène collectif passé d’un contexte social à un autre. Quant au popping, il est évoqué non pas comme une référence hip-hop à citer, mais comme un geste qui a voyagé des parcs californiens aux battles internationales avant de filtrer dans sa propre pratique.
Cartographie de la mémoire collective
Le mot “groove” évoque un rythme. Chez elle, il devient une façon d’observer ce que chaque corps transporte : des influences invisibles, des danses apprises par imitation, des gestes nourris par des communautés entières. Ce n’est donc pas un catalogue d’inspirations, mais une cartographie en mouvement, où les souvenirs deviennent matière chorégraphique. Depuis sa création en 2021, la pièce a circulé en Europe, en Asie, au Canada, avant de rejoindre Madagascar, pays d’origine de l’artiste. Ce retour ne relève pas du symbolique, mais de la continuité : Groove n’achève pas son voyage, il le prolonge. Il rappelle qu’aucune danse ne naît isolée, et qu’un geste, lorsqu’il s’exporte, raconte d’autres histoires sans jamais cesser de se transformer.



