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Economie

Raphaël Jakoba : L’attractivité, une condition sine qua none du développement

02/06/2023 08:57 © Midi Madagasikara

Manager de Madagascar Conseil International (MCI), Raphaël Jakoba est devenu une figure incontournable du monde des affaires à Madagascar.

Ce conseiller juridique international a, à plusieurs reprises, apporté ses compétences en matière d’expertise juridique pour l’élaboration de textes relatifs aux investissements. Pour ne citer, entre autres que la loi sur les zones économiques spéciales, l’arsenal relatif à la politique nationale de logements, mais également et surtout la nouvelle loi sur les investissements qui vient d’être adoptée par les deux Chambres. Celui qui a par ailleurs apporté sa contribution dans l’élaboration du code du tourisme apporte quelques éclaircissements sur certains faits d’actualité de l’environnement des affaires qui prévaut à Madagascar. Interview.

Midi : On a toujours dit et on le dit encore. La croissance économique de Madagascar passe par les investissements privés. Jusqu’à présent le développement attendu n’est pas encore au rendez-vous. Comment expliquez-vous cette triste réalité ?

Raphaël Jakoba : Effectivement, il n’y a pas encore, à Madagascar, une croissance réelle qui impacte directement sur la vie de la population. Et l’un des facteurs qui bloque la relance économique c’est justement la faiblesse du taux d’investissement privé locaux ou internationaux. Cela découle essentiellement du fait que l’épargne intérieure brute de Madagascar n’est pas suffisante pour combler l’énorme besoin d’investissements. Certaines estimations parlent d’un besoin annuel de 1,500 milliards USD d’investissements pour booster la croissance. Malheureusement on est encore trop loin de ce niveau.

Midi : Que faut-il faire pour renverser la tendance.

R.J. : Comme je l’ai toujours dit, tout est question d’attractivité. Les autorités doivent absolument tout mettre en œuvre pour attirer les investisseurs directs étrangers pour accompagner le développement. Car pour le moment il n’y a pas encore beaucoup de gros investissements de la taille d’Ambatovy, par exemple. Et ce, pour la bonne et simple raison que l’image du pays auprès des grands investisseurs internationaux est ternie par ces projets qui sont bloqués pendant des années à cause d’une règle du jeu qui n’est pas claire et qui change tout le temps. Je prends l’exemple des projets miniers de Blackearth Minerals, Akora Iron Ore, Nextsource qui sont à plus d’un milliard de dollars et qui pourraient être investis à Madagascar, s’il n’y avait pas cette attentisme provoqué justement par des problèmes de gouvernance, comme le gel des permis miniers depuis 2010.

Midi : Pouvez-vous être plus concret ?

R.J : Je prends l’exemple de deux projets qui restent d’actualité que sont l’hydroélectricité de Sahofika et l’exploitation d’ilménite de Base Toliara à Ranobe. Je tiens d’abord à préciser que contrairement à ce que l’on dit, le projet Sahofika n’est pas suspendu ou arrêté. Il y a juste un problème au niveau de l’Engineering Procurement Contract (EPC) et les négociations continuent, même si la signature des contrats de concession et d’achat d’énergie avait déjà été effectuée au Palais d’Etat d’Iavoloha au mois de novembre 2021. Le retard dans la mise en œuvre effective du projet a évidemment impacté sur son coût qui était initialement de 800 millions de dollars mais qui frôle actuellement le milliard de dollars en raison de l’augmentation des prix consécutive à la crise ukrainienne. Pour Base Toliara, je suis désolé de le dire, mais c’est l’exemple type d’un projet mis à mal par le politique. C’est un important investissement qui se chiffre à 700 millions de dollars qui, au même titre qu’Ambatovy, devrait bénéficier de la Loi sur les grands investissements miniers à Madagascar (LGIM), un arsenal juridique qui est d’ailleurs appelé à être refondé très prochainement, après l’adoption du nouveau code minier. Or, vous savez comme moi que le gouvernement malgache a décidé de suspendre le projet en 2019 sans explications très approfondies, avec une communication assez sommaire. On a juste expliqué que le projet ne répond pas au contenu local ou encore qu’il ne considère pas assez les vrais besoins de la population locale. Pour moi on peut résoudre ce problème en corrigeant ensemble ce qu’il faut corriger et en avançant pour parvenir à des solutions pérennes qui permettront à ce projet de reprendre. Car il ne faut pas oublier que derrière ce projet, il y a aussi beaucoup de gens qui attendent sa réouverture pour retrouver de l’emploi. Dans tous les cas, et comme tous les grands projets miniers, Base Toliara est une opportunité de développement pour la région Sud particulièrement et pour l’économie malgache en général. Il est temps que l’Etat puisse trouver une solution car la population attend également les effets induits de ce projet qui, comme Ambatovy peut faire vivre d’autres entreprises. Sans oublier les ristournes que Base Toliara aura à verser. Par ailleurs, en cas de non réouverture, le cas de Base Toliara sera considéré comme un mauvais exemple de plus scruté par les grands investisseurs miniers du monde qui pourraient de ce fait considérer Madagascar comme un pays non attractif. Bref, l’attractivité est une des conditions du développement de Madagascar à travers les investissements directs étrangers. Mais il appartient à l’Etat de faire l’équilibre entre attractivité et souveraineté nationale. Pour conclure je tiens à souligner l’importance d’une initiative gouvernementale qui, à travers le ministère de l’Industrialisation, du Commerce et de la Consommation concocte une grande innovation en préparant un projet de loi sur la programmation industrielle qui fera office de « pacte sur l’industrie ». Un important projet pour le futur de l’industrialisation à Madagascar.

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